Les 8 indispensables du FrancoFans 68


MAGGY BOLLE

J’suis pas ta mère !

(Le cri du corbeau)

Avertissement avant écoute : attention, ce disque risque de heurter la sensibilité d’un grand nombre de bien-pensants. Oui ! Maggy Bolle est de retour avec un nouvel opus bien cinglant : J’suis pas ta mère ! Décapante, ironique, la Mag’ a fait de la dérision son arme fatale, disant tout haut ce que beaucoup d’entre nous pensent tout bas, et c’est du bonheur ! Tout va mal ? c’est cool ! Ça, c’est pour donner le ton. S’ensuivent des titres plus acérés les uns que les autres, qui dressent de notre société un portrait peu glorieux, avec son lot de machos (Beaux pains dans ta gueule), de boulets (Colette, Les gosses), de vérolés en tous genres (Les enculés, L’estafette marine)... Un extrait de live, reprise d’un morceau de Jean-Luc Fonck (Sttellla) vous résumera bien l’esprit qui l’anime. Grossière, gouailleuse, elle met les pieds dans le plat et fait qu’on se marre du début à la fin de l’écoute... T’es pas ma mère Maggy ? Dommage...

www.maggybolle.fr

Sandrine Palinckx


MR YÉYÉ

Hybride

(One Hot Minute)

C’est grâce à l’émission Quotidien qui a créé un pastiche avec le titre On s’en bat les couilles que Mr Yéyé a été révélé au grand public. Il faisait déjà partie des valeurs sûres « underground » dans un registre qui risque de surprendre ceux qui s’attendent à du rock humoristique. Avec Mr Yéyé et ses trois musiciens, on replonge dans l’âge d’or du rock des années 90-2000, cette belle époque où fleurissaient les Limp Bizkit, Deftones, Korn ou Angra... Seule différence, Yéyé Liquini a opté pour le texte en français. On plonge donc dans la Fournaise, introduisant un album aux textes sombres, traitant de l’égarement (Chute libre, L’instinct de survie), la déception de l’autre (Idole, Sal*pe), et bien évidemment les politiques à travers Ça commence par des mots, ça finit par des morts. En prime, un livret aux illustrations tout aussi enténébrées. Mr Yéyé, assure sans aucun doute, avec ce second album, la relève de la scène métal française.

www.mryeye.com

Stéphanie Berrebi


JEAN-LOUIS MURAT

Travaux sur la N89

(Pias)

En 1999, Murat nous avait mis une bonne paire de claques avec l’album Mustango qui augurait d’un tournant dans sa création. Dix-huit ans et quelque seize albums plus tard, le revers est tout aussi saisissant. Travaux sur la N89 est une belle image du chantier musical qui traverse cet album, au long de quatorze titres qui ont été pensés comme un seul. Murat déstructure la note, rajoute des synthés, des ambiances douces ou psychédéliques et ne laisse aucun répit à l’étonnement et à la rêverie. Pour les arrangements, il s’est attaché les services de Denis Clavaizolle et de son univers si particulier. Après avoir travaillé sur le projet des Songes de Léo de Morgane Imbeaud, la fragile sensibilité de cette dernière parcourt l’album sur les choeurs et pour deux duos planants. Pour écouter et comprendre cet étonnant projet, n’hésitez pas à emprunter la Nationale 89, sur les hauteurs d’Orcival.

www.jlmurat.com

Mathieu Gatellier


ALEXIS HK

Georges & moi

(La Familia)

En plus d’être un des plus grands auteurs de sa génération, Alexis HK s’impose avec cet album comme un grand interprète. Ceux qui durant ces deux dernières années ont pu assister au spectacle dont est tiré ce disque, savent qu’Alexis HK nous offre une relecture, voire une réécriture du répertoire du Moustachu. Les chansons, telles que Quatre-vingt quinze pour cent, Le vin, Misogynie à part, l’incontournable (surtout par les temps qui courent) Le temps ne fait rien à l’affaire, ou le sublime Fossoyeur, sont entrecoupées par des « conversations », des dialogues imaginés avec Tonton Georges, co-écrits avec François Morel. Avec la complicité de Simon Mary à la contrebasse ou ukulélé basse et Loïc Molineri aux guitares manouche ou électrique, on retrouve la voix enveloppante d’Alexis et son humour mordant dont il est difficile de se lasser. Pour citer à notre tour Brassens, dans ce disque, il n’y a Rien à jeter !

www.alexishk.com

Stéphanie Berrebi


BROU-COUTON

Chansons nantaises

(Auto-produit)

Leur dernier album, Complaintes et chansons, nous laissait admiratifs, les voilà de retour avec treize titres consacrés à la ville de Nantes, dont on soulignera l’omniprésence ancestrale dans les chants populaires de la francophonie tout entière. Dans ce genre précis, Roland Brou n’est rien de moins que l’un de nos meilleurs chanteurs, et sans doute le plus grand interprête actuel de complaintes. Patrick Couton est un magicien de la six cordes (hawaïenne souvent), du cinq cordes (banjo) et même de la trente-six (autoharp), son travail de composition et d’arrangements est souvent stupéfiant de beauté. Il insuffle à l’ensemble des couleurs blues et folk outre-Atlantique bienvenues et ce métissage est d’une efficacité redoutable. La modernité se retrouve aussi dans un répertoire où traditionnels peu courants côtoient des auteurs nantais contemporains, dont Michel Boutet. Sans surprise, c’est une réussite.

www.facebook.com/Brou-Couton

Jean-Pierre Michy


GAËL FAURE

Regain

(Sony)

Dans la jungle des musiques actuelles et des nombreux projets qui fleurissent, il y a une herbe tendre qui se distingue et pousse toujours plus vaillante et plus délicate : la musique de Gaël Faure. Avec Regain, son deuxième album, le trentenaire au plus proche de la nature fait part de préoccupations écologiques (La saison, Colibri) et explore les chemins sinueux de l’introspection (Les visages officiels, Caractère). Il mesure aussi le temps qui passe sur le calendrier de ses amours (La belle échappée, Traverser l’hiver) et Le goût des choses, longue ballade lancinante où la voix du chanteur, d’ordinaire grave et sensuelle, nous surprend par ses envolées. Il nous étonne encore par la force à faire de chaque titre des chansons entêtantes qui invitent à la rêverie. À la lisière de la folk, sur fond d’arrangements électroniques simples et subtils, il sème une mélancolie discrète et libératrice. À écouter comme un remède pour « ne rien voir passer du froid et traverser l’hiver ».

www.gaelfaure.com

Marylin Clarisse


GYPSETTERS

Éponyme

(Vlad)

Bienvenue au sein de cette nouvelle compagnie aérienne ! À l’instar de Pégase, les Gypsetters ont pris leur envol et nous invitent au voyage à bord de leur roulotte ailée. La place de commandant revient alors à Romain Pierre, alias Boris Viande qui oeuvre entre autres avec Sidi Wacho. À ses côtés, deux hôtesses à la personnalité bien trempée : Angelina Birs et Erika Serre qu’on a régulièrement entendues chanter avec La Caravane Passe... Mélange d’électro et de chanson pop-rock aux parfums tziganes et cuivrés, la musique des Gypsetters est puissante, poétique et émotionnelle. S’exprimant majoritairement en français, les deux chanteuses unissent leurs voix singulières pour confier leurs états d’âme et leurs envies de liberté. Même si les textes s’inscrivent dans un registre assez sombre, il en jaillit une vraie positivité qui prend toute sa dimension dans une ambiance naturellement entraînante et festive.

www.vladproductions.fr/gypsetters

Nicolas Claude


PHILIPPE BRACH

Le silence des troupeaux

(Spectra Musique)

Après La foire et l’ordre paru en 2014 et Portraits de famine en 2015, Philippe Brach revient avec Le silence des troupeaux. Qualifié souvent de surdoué, de novateur mais aussi d’original et de dérangeant comme dans son clip controversé Crystel, ce jeune auteur-compositeur-interprète québécois nous invite à venir découvrir son nouvel univers. Nous y accédons en lisant les Lettres du frère hurlant de Julien Lavoie présentes sur le livret de l’album puis par Le silence des troupeaux, morceau orchestral puissant composé par La Controverse (Gabriel Desjardins). Nous arrivons alors dans une société postapocalyptique (La fin du monde). Après quelques chansons folk-rock où les problèmes de cœur dominent (Pakistan, Rebound), le Cantique de l’abandon nous fait basculer dans un monde qui s’assombrit jusqu’à La guerre (expliquée aux adultes) avant de terminer par un Joyeux anniversaire mais pas tant que ça... Un album très singulier, on adore !

http://philippebrach.com

Richard Clochard