Les 8 indispensables de la rédaction



BOUCAN

Déborder

(Auto-produit / L’Autre Distribution)

Comment définir le style de Boucan, ce trio composé de Mathias Imbert, Brunoï Zarn et Piero Pépin, trois artistes aux antécédents déjà bien fournis dans le milieu de la chanson, du rock et du punk ? D’emblée, le magnétisme agit au travers des voix et d’instruments tels que le banjo, la contrebasse ou la trompette. L’atmosphère est spéciale, nous aspire dans un sentiment d’inconnu… Entre chanson acoustique et ambiance de western, ce sont les éléments naturels qui s’entrechoquent pour donner du relief à la poésie néo-réaliste du groupe. Du chaud et du froid, de la douceur et de la rage, du clair et de l’obscur, comme si la musique de Boucan était le résultat de diverses réactions physiques et naturelles dues aux principes de la collision. On dit que le calme peut annoncer une tempête et c’est bien ici le cas, ce genre de tempête qui fait Déborder des égouts déjà bien saturés le long des trottoirs…

www.boucan.org

Nicolas Claude


DEBOUT SUR LE ZINC

Vian par Debout sur le Zinc

(Productions Jacques Canetti/DSLZ)

Il y a un siècle, naissait un homme qui allait laisser une trace indélébile de son passage sur Terre : Boris Vian. Cent ans après, Debout sur le Zinc a choisi de faire revivre une partie de son répertoire au travers de quinze titres. Et cela fonctionne à merveille. Si le son est résolument celui de Debout sur le Zinc, ce son qui flirte aussi bien avec le rock, le jazz qu’avec des ambiances plus slaves ou orientales, les mots de Vian reprennent toute leur ampleur… On redécouvre des textes forts, signes de l’engagement d’un homme qui ne se posait aucune limite : l’incontournable Déserteur, mais aussi d’autres titres prôneurs de liberté de penser et d’affranchissement des règles : L’âme slave, Ne vous mariez pas les filles… Cinq inédits sont à découvrir, parmi eux, On fait des rêves et S’il pleuvait des larmes, deux textes toujours d’actualité. Le défi était de taille. DSLZ l’a relevé !

www.dslz.org

Sandrine Palinckx


VINCENT PRÉMEL

Un café, une bière ou un tour du monde

(Barlavento / L’Autre Distribution)

Loin du fracas assourdissant de notre quotidien, la douce poésie de Vincent Prémel nous suggère sobrement d’apprendre le temps de vivre et d’espérer. Carnet de voyage, carnet de bord, carnet de coeur, cet album rassemble ses souvenirs de pérégrinations maritimes. On y découvre de jolies petites rencontres sucrées ou salées au détour de quelques ports. Chaque chanson, sur des rythmes chaloupés, visite une étape de bourlingue et son inventaire bigarré. La philosophie est simple : les petites choses de la vie, ici ou ailleurs, ne s’entendent que si nos oreilles sont solidement accrochées à notre coeur. L’invitation est trop bien formulée, on embarque pour se nourrir de périples (Cargo), d’escales (À Marseille, Istanbul) et de rencontres (Anna, Gaël). L’amour, la mer et la mort, appuyé par un clip simple et touchant, témoigne de la sincérité sans esthétique inutile d’un artiste généreux.

www.vincentpremel.fr

Jean-Hugues Mallot


MANU

L’horizon

(Tekini Records)

Troisième parution en quatre ans pour Manu, égérie d’un rock français libre et ambitieux. L’horizon est un tour de force supplémentaire dans sa discographie, tant le travail abattu est colossal. Vingt titres, soixante-trois minutes, dans lesquels rien n’est laissé au hasard. Le travail de production et d’arrangements vaut déjà à lui seul une écoute attentive. Sur la base rock 90’s qui fait sa marque de fabrique, Manu fait des ponts vers la pop, le rock progressif, l’électro ou le kraut allemand, construit ses chansons avec des dizaines d’instruments, utilise les samples et les programmations. Elles sont ainsi construites comme des pièces, composées de plusieurs atmosphères. L’album se déroule comme un livre qui démarre sur les chapeaux de roue (Regarde, Entre 2 eaux, La sonate) avant d’entrer dans des eaux plus douces, au fil des interrogations de Manu, de ses constats lucides et désabusés sur la relation à l’autre. Superbe.

www.manu-friends.com

Benjamin Valentie


HILDEBRANDT

ÎleL

(At(h)ome / Sony)

Trois ans après Les animals, salué par la critique, paraît ÎleL. Dans la lignée du précédent, l’électro-pop a toujours un rôle central. Encore faut-il qu’elle soit au service du texte, ce qu’arrive parfaitement à faire Hildebrandt. Il sait alterner les instants percussifs et plus doux, tout en gardant une musicalité dans laquelle la mélodie, soignée, est sa signature. La présence d’Albin De La Simone au piano apporte une grâce complémentaire. Hildebrandt le Rochelais se nourrit des îles qui l’entourent. Il y puise son côté sauvage, mélangé à une discrétion et un recul sur notre société qui transpire dans ses textes. Il y invoque ici la recherche d’identité, fait fi des codes établis pour mieux dévoiler cette part de féminité qui l’habite (Garde tout bas, Je suis deux, Travesti). Entre un vibrant hommage à sa grand-mère (Émilienne) et à la femme de sa vie (Vingt), les douze titres sont une bouteille à la mer qu’on aimerait tous voir échouer dans nos vies.

www.hildebrandt-music.com

Mathieu Gatellier


FABIEN MARTIN

.aMour(s)

(Littoral Records)

Fabien Martin revient avec un nouvel album, .aMour(s), un album très pop aux influences anglo-saxonnes marquées, plein de peps qui finit sur des notes de plus en plus mélancoliques. Fabien Martin a écrit et composé son album comme un concept album sur le thème du couple. Il ose tout d’abord se montrer heureux en parlant d’amour parfois tout simple qui se passe bien comme Dans les bras l’un de l’autre. Il intercale d’ailleurs des textes d’Ingmar Bergman tirés de Scènes de la vie conjugale qui parlent d’une vie de couple réussie, des intermèdes rafraîchissants et qui nous redonnent l’envie d’y croire, jusqu’au troisième extrait qui nous montre tous les paradoxes dont nous sommes constitués. Alors c’est une dégringolade progressive comme dans Middle of nowhere qui parle de la distance qui peut s’installer de façon pernicieuse dans le quotidien d’un couple et qui se termine avec la séparation, inéluctable, dans L’amour serait presque parfait.

www.fabienmartin.fr

Julie de Benoist


THE FAT BASTARD GANGBAND

Masala

(Belka)

Bientôt dix ans de cavale et The Fat Bastard GangBand organise toujours ses vols collectifs de musiques du monde ! Chantant en plusieurs langues et armés d’une quinzaine d’instruments, les sept Lyonnais nous kidnappent pour nous inviter à la fête. Avec des titres qui annoncent la couleur (Balkan Klub, Cumbia Libre, Jungle Calypso), Masala porte bien son nom, celui du mélange d’épices dans la cuisine indienne… De la chanson française (Mon amour), de la musique cubaine (C’est pas pour toi), des sonorités orientales et balkaniques (Supertsar, Masala), du hip-hop groovy et funky (Saint Louis)... La liste des ingrédients ne peut être complète, mais toujours estil qu’ils se lient à merveille pour donner à ce troisième album beaucoup de relief et une explosion de saveurs. Fort de sa diversité d’influences, le FBGB confirme un caractère multiculturel qui devrait naturellement servir d’exemple.

www.thefatbastardgangband.com

Nicolas Claude


SOPHIE LE CAM

Veuillez croire

(Auto-produit)

Elle s’est fait remarquer par son tube Les gens gentils. Sophie Le Cam se régale dans ses chansons à croquer une société ramollie et décadente. Son écriture est impertinente et poétique. La musique est douce, les mélodies efficaces, les morceaux sont autant de tableaux sur des thèmes souvent « français moyen », avec une prédilection de la chanteuse pour les prénoms, Tous les Michel, Margaux, Lulu, qui sont autant de titres de son album. Le langage est frais et plein d’humour « ça fout la pétoche… des boules de pétanche », ou plus loin, « j’te f’rai dire ». L’ambiance du disque serait un peu désabusée s’il ne perçait un véritable attachement de Sophie Le Cam pour les gens dont elle parle, les vraies gens en sorte, les gens gentils. Sophie sait aussi faire twister les sujets graves « la Torah, le Coran, la Bible », que la musique ponctue à contre-ambiance, c’est assez malin. On attend maintenant la chanteuse sur un album plus long, plus fourni.

www.sophielecam.fr

Annie Claire